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| Sujet: Tous les matins du monde Sam 13 Aoû - 15:02 | |
| [Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]« Gentle people with flowers in their hair. » Le matin avait toujours été pour moi le moment le plus séduisant de la journée. Il y avait quelque chose, dans ces rues encore désertes de gens pressés, dans ces odeurs de pain frais, dans ces brumes matinales, qui me plaisait. J’avais l’habitude de me lever en même temps que le soleil, pour apprécier son ascension progressive dans le ciel, et les doux reflets rose-orangés qu’il propageait. Le samedi matin était de loin mon favori. Je me levais à 4 heures pour me rendre au marché. D’immenses allées remplies de toutes sortes de fleurs. Il y avait là bas tant de couleurs, de parfums et de bruits que cela me faisait inlassablement commencer la journée de bonne humeur, même si je n’avais pas trouvé tout ce que j’étais venu chercher. J’adorais ce rendez-vous hebdomadaire où se retrouvaient les fleuristes de toute la région pour partager leurs préoccupations vitales. Toutes concernaient les fleurs évidemment. Le soleil était encore couché, le monde n’était pas encore éveillé, et pourtant dans ces immenses hangars, l’agitation battait déjà son plein. Je pris mon temps pour faire le tour, examinant avec soin les plantes, choisissant celles qui me convenaient. J’aimais ce marché parce que j’avais l’impression de faire partie de quelque chose. J’étais un petit bout de cette bonne humeur, une petite part de cette bonne ambiance. Je commençais toujours le Samedi du bon pied.
La brise matinale rendait le lever de soleil particulièrement agréable tandis que je déchargeai mes nouvelles acquisitions. C’était là une épreuve particulièrement difficile pour mes petits bras qui avaient souvent du mal à soulever les caissons de fleurs. Mais la satisfaction que j’éprouvais en regardant mes fleurs nouvellement exposées valait largement l’effort qu’il fallait fournir. Il ne me fallut pas longtemps pour répartir dans la boutique mes nouvelles fleurs, que je regardais avec le même œil attendri qu’une mère aurait adressé à ses enfants. 7h 30, j’étais pile dans les temps. Je vérifiai ma messagerie, remontais le volet qui couvrait la vitrine, et finalement tournai le panneau, indiquant ainsi que la boutique était ouverte. J’aimais ces rituels, qui faisaient partie de chacune de mes journées. C’était mon moment de solitude. Je n’avais pas de raison de me presser, et aucune de m’ennuyer. Mon rituel achevé, ne m’attendant pas à apercevoir la moindre trace d’être vivant avant une bonne heure, je pénétrai dans l’arrière boutique, m’attablant à l’aspect que j’aimais la moins dans ce métier : les comptes. J’eu pourtant la surprise d’entendre teinter la cloche que je détestais tant, et que je m’étais promis un million de fois de changer. « J’arrive dans une seconde ! » Trop heureuse d’abandonner la tache à laquelle j’allais m’atteler, je me levai et rejoignis la boutique d’un pas léger. « Bonjour, je peux vous aider ? » C’était une jeune femme, à qui j’adressai un grand sourire. Samedi était toujours un bon jour.
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| | | admin ⚓ So I flew to the sun. Lost track of my soul on the run.
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| Sujet: Re: Tous les matins du monde Sam 13 Aoû - 21:05 | |
| “ earth laughs in flowers ”Quand j'étais petite, j'aimais faire des couronnes de fleurs avec des marguerites, leur parfum me rendaient un peu plus gaie et ma mère ne me cessait de dire que j'étais jolie. Puis, malheureusement, j'avais grandi, et les grandes filles ne font pas des couronnes de fleurs, non, ce qui était à la mode, c'était de faire des couronnes de garçons. Ce n'était pas ce à quoi j'aspirais. Au lieu de ça, j'avais continué une vie bien tranquille, j'avais excellé dans mes études, comme toujours, et je ne m'étais occupée de rien d'autre. Non, je ne cherchais pas à avoir le meilleur travail, je voulais gagner le plus de temps avant de rentrer dans le véritable âge adulte, je voulais trouver la passion qui me ferait remonter la pente. Évidemment, ce n'était pas avec mes deux ans d'avance que j'avais pu prendre mon temps, mais mes parents semblaient tellement heureux lorsqu'on leur annonçait que je pouvais sauter une classe. J'avais toujours eu peur, et puis finalement, c'était comme tout, on s'habitue. On tente d'accepter le fait qu'on ne fera plus de couronnes de fleur, qu'on doit avoir des dîners d'adultes et boire du vin blanc avec du poisson et rire aux blagues sur l'économie du pays, comme si cela dé-dramatisait la situation. J'essayais de comprendre le but de ces diners entre 'amis' en regardant mes parents sourient hypocritement. Je finis par faire glisser ma chaise sur le carrelage dans un bruit sec. « Je ne me sens pas très bien. » Faux, totalement faux. Et si vrai. Physiquement, tout allait bien, mais ma tête allait exploser devant tant de mise en scène. « Tu es sure ma chérie ? Tu n'as pas touché à ton assiette. » Je grimace. « Oui, j'ai bien mangé ce midi, j'ai un peu mal au crâne et au ventre, tu sais, la mauvaise semaine. » Je fais un semblant de sourire gênée. Si elle faisait attention à moi, elle ne me ferait pas un sourire pour m'autoriser mais se demanderait pourquoi j'ai mes règles sans interruption depuis deux mois. Mais elle ne remarque rien et, fatiguée, je monte les marches de la maison.
J'étais restée debout toute la nuit, une subite envie de voir le soleil se lever, de ne plus entendre les tintements de verre, ne plus m'endormir pour faire un mauvais rêve qui me ferait me réveiller dans un cauchemar encore pire que celui qui me hante dans mon sommeil. Les gens ont parfois peur de faire des cauchemar. Je me réveille dans un cauchemar. C'est quoi le pire ? Aux alentours de huit heures, lorsque mes parents dormaient encore, j'enfilais un short en jean et attachait une chemise trop grande au niveau de ma taille. Je passais mes ballerines aux pieds et me dit que quitte à rester éveillée, autant voir la ville alors que personne ne pouvait encore s'éveiller et m'observer. J'étais invisible. Sac sur l'épaule, je me dirigeais vers le centre ville pour chercher un café. La seule boutique qui semblait ouverte à cette heure matinale était le fleuriste. Mes parents repartaient lundi, la maison sentirait la javel de la femme de ménage le soir... Des fleurs, pourquoi pas. Je fis teinter la clocher et rentrait timidement dans le magasin qui semblait désert. Je fus tout de suite accaparée par l'odeur. Et je la vis, une jeune fille, d'à peu près mon âge, qui semblait pourtant totalement différente. « Oh, euh, oui. Mais je ne sais pas trop ce que je veux. » Je soupirais, depuis combien de temps je n'avais pas du demander quelque chose à quelqu'un ? « Le truc, c'est que je vais être dans une maison totalement vide, et je voudrais juste... une odeur dedans, vous voyez ? » Je grattais la nuque, j'aurais du faire une recherche google. Ou commander par internet. |
| | | | Sujet: Re: Tous les matins du monde Dim 14 Aoû - 20:03 | |
| J’observais un instant la jeune femme, dont la beauté me toucha instantanément. Particulièrement mince, peut-être même un peu trop, elle était incontestablement belle. Elle semblait presque déplacée dans le décor de ma boutique, trop gracieuse pour se trouver là. Je me sentis alors incroyablement banale face à cette beauté complexe. « Oh, euh, oui. Mais je ne sais pas trop ce que je veux. » Je souris patiemment, quoi qu’un peu surprise. Avant, les gens arrivaient et demandaient des conseils. Ils voulaient qu’on les aide à choisir. Mais maintenant tout le monde était pressé, on n’avait plus le temps de s’arrêter pour choisir des fleurs. Quand ils entraient dans cette boutique, les gens avaient rarement envie de m’entendre les conseiller sur les différentes fleurs. Ils me disaient pour quelle occasion ils avaient besoin d’un bouquet, et me laissaient faire. Si par malheur je me mettais à parler, la réponse la plus basique était « faites, faites, c’est vous l’experte ». J’avais donc appris à apprécier particulièrement les enfants voulant faire plaisir à leur maman, les petits vieux qui ont toujours le temps de parler, et les mères au foyer qui aiment bien prendre leur temps, une fois sorties de la maison. Mais je voyais rarement des jeunes apparaître juste pour le plaisir d’acheter des fleurs, sans occasion, en ayant du temps.
« Le truc, c'est que je vais être dans une maison totalement vide, et je voudrais juste... une odeur dedans, vous voyez ? » Nouveau sourire, j’étais programmée pour ça. Mais sa requête me rendait réellement heureuse. Les fleurs, quoi que bien pratiques pour se faire pardonner ou célébrer une quelconque occasion, étaient avant tout faites pour être admirées. Et bien entendu, cela passait par le parfum. De plus, mon interlocutrice semblait avoir réellement envie, et même besoin de mes conseils. Et cela me mettait réellement en joie. « Bien sur, on va vous trouver ça. Alors, voyons-voir … » Des yeux, je parcourus alors l’ensemble du magasin, cherchant que lui proposer. Les lilas dégageaient un parfum particulièrement agréable. Mais un nouveau coup d’œil à ma cliente me dissuada immédiatement d’émettre cette proposition. Les lilas étaient des fleurs de vieux. Elles étaient sans imagination, sans réelle saveur. J’aurais conseillé des lilas pour embaumer une maison de retraite. Plus je regardais la jeune femme, moins je trouvais que cela lui correspondait. Il y avait quelque chose chez elle, qui semblait être une pure invitation au voyage, qui donnait envie de partir loin.
Chassant cette idée stupide d’un mouvement de tête, je tirai sur mon pull gris, tentant de trouver ce qui lui y irait le mieux. « Et bien, dans les fleurs qui sentent bon, on a bien sur l’incontournable rose. Mais c’est un peu banal, les roses … Ou alors, on pourrait mettre ça avec du lys. Ça sent particulièrement bon aussi, et les deux ensembles peuvent faire un très beau bouquet. Bien sur, symboliquement c’est un peu mesquin … » Je m’arrêtais de parler, réalisant soudain que je monologuais. Je visualisais parfaitement le bouquet dans ma tête à présent, et je m’étais laissée emportée, une nouvelle fois. Il fallait sérieusement que je pense à me faire soigner, comme me disait ma sœur. Et puis, parler de mesquinerie n’était surement pas la meilleure façon de vendre mes fleurs. «Enfin bon, la symbolique ne vous importe surement pas. Donc, je pensais à des lys roses et des roses blanches. » J’aurais certainement dû prononcer seulement cette dernière phrase, à la place de mon petit speech. Avec un nouveau sourire, je montrais de la main les fleurs auxquelles je pensais, incroyablement gênée.
Dernière édition par Andrew M. Connor le Jeu 18 Aoû - 20:45, édité 1 fois |
| | | admin ⚓ So I flew to the sun. Lost track of my soul on the run.
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| Sujet: Re: Tous les matins du monde Lun 15 Aoû - 18:22 | |
| “ earth laughs in flowers ”Si on y pensait, j'étais une de ces personnes oisives dans l'aristocratie. Je ne faisais rien de mes journées, si ce n'est mes études qui, bien qu'intéressantes, j'étais sure que si j'avais eu le choix, j'aurais suivi mes cours par le biais d'internet, chez moi, sans avoir besoin de me confronter au 'peuple' comme ils disaient. Personnellement, ce n'était aucunement par mépris, mais par peur. Je me sentais perdue dès que j'étais en présence humaine et c'était sans doute pour cela que j'aimais autant mon chat. Je pouvais lui dire n'importe quoi, il ne serait pas blessé, et il était toujours partant pour s'affaler sur mon ventre quand je regardais la télévision. Le compagnon parfait. Elle me fit un sourire et je baissais le regard, j'étais hors de ma zone de sécurité, et je ne savais pas du tout comment les gens agissaient chez les fleuristes. Hormis Ted dans How I Met Your Mother qui ne savait se décider sur son orchidée. Les fleurs étaient la décoration de table lors des diners et j'étais toute à fait désarmée face aux nombres de plantes qui se trouvaient là, mais encore plus face à son regard, se jetant sur chaque pétale, avait l'air de savoir exactement ce qu'il sentait, ce qu'il signifiait, ça ressemblait à de la magie.
J'aimais voir les gens sourire. Surtout pour des petites choses telles que celles-là, elle semblait vraiment ouverte, c'était une qualité que j'admirais chez les gens. Je ne l'avais pas, j'étais du genre à éviter le contact humain et rester dans ma zone de sécurité au maximum. Mais dans ce magasin, c'était comme d'être ailleurs, dans la rosée matinale, une bulle où on pouvait se sentir invincible, sans crainte d'être blessé. Je la suivais du regard, l'observant tirer sur son pull d'une manière maladroite, alors que je restais plantée là à l'écouter. Elle se coupas soudainement dans sa phrase. Je ne m'y connaissais pas du tout en fleur, alors pour une fois, je ne réfléchis pas à quelque chose à dire qui ne m'aurait pas engagé dans la conversation ou une manière de fuir, il était si tôt que je n'avais pas encore ordonner à mon cerveau asocial de se réveiller et me sortir du pétrin d'être en train de construire un dialogue avec quelqu'un. « Ah bon ? … Je m'y connais pas vraiment, je sais juste que hum, les roses ont des épines, c'est tout je crois, c'est un peu pitoyable en fait. » Je fis un sourire gêné, je ne m'étais jamais intéressée aux fleurs, à dire vrai. Je réalisais l'erreur maintenant, en la voyant si passionnée. Je déglutis et finit par articuler, timidement. « Et, euh, ça... ça veut dire quoi ? » Je passais une main dans mes cheveux, le monologue avec mon chat était plus simple. Je me rapprochais d'elle et pointait le bouquet du doigt, je voulais vraiment faire les choses bien, pour une fois, ne pas juste faire des courses en ligne, je devais choisir quelque chose qui avait de la saveur, une odeur qui me ferait me sentir mieux en quelque sorte, qui mettait du baume au cœur, et qui faisait voyager, comme si de sentir se bouquet me remettrait dans l'ambiance particulière qu'avait cette boutique à mon cœur. « je peux sentir ? Enfin, si ça ne vous gêne pas, bien sur. » J'avais l'habitude de vouvoyer tout le monde, peu importe l'écart d'âge, jusqu'à qu'ils me disent si c'était la peine ou non, ce n'était pas tant pour mettre une certaine distance ou différence de classe sociale comme certains le faisaient, c'était naturel, du respect, on me l'avait enseigné de la sorte et naturellement, j'avais continué. Pourtant, j'avais l'impression d'être proche d'elle, tant que l'on restait dans cet « autre part » assez intriguant. Certaines personnes vous font des effets différents, je pense. |
| | | | Sujet: Re: Tous les matins du monde Jeu 18 Aoû - 21:15 | |
| Je devais sans doute ressembler à une folle. Le genre de fille qui ne vit que pour et par ses fleurs, et qui effraye le moindre client par un trop-plein d’informations. Mais j’aimais toujours qu’on me demande mon avis. Une fois lancée sur les fleurs, j’avais parfois un peu du mal à m’arrêter. J’étais cependant heureuse que la jeune femme en face de moi ne soit pas partie en courant, apeurée par ce petit monologue. « Ah bon ? … Je m'y connais pas vraiment, je sais juste que hum, les roses ont des épines, c'est tout je crois, c'est un peu pitoyable en fait. » Je parti d’un immense éclat de rire, avant de réaliser qu’elle était sérieuse. Le sourire gêné sur ses lèvres ne laissait aucune place au doute. Je me repris, peu désireuse qu’elle pense que je me moquais d’elle. Les gens ne connaissent en général pas grand-chose aux fleurs, mais ils n’osent jamais le dire. La peur de ce que les autres pensent dicte l’attitude d’un bon nombre de personnes. Et cela s’appliquait également aux connaissances en matière de botanique, malheureusement. « Bien sur que non ! Et puis, si tout le monde connaissait parfaitement les fleurs, à quoi je servirais ? » Je lui fis un sourire rassurant, tentant vainement de rattraper mon rire.
Je pris quelques roses blanches, du lys rose et les mélangeais un peu. Ca n’avait pas l’allure d’un bouquet que j’aurais pu vendre, mais au moins pouvait-on se faire une idée, à la fois de l’esthétique, et de l’odeur, puisque c’était ce qu’elle voulait principalement. « Et, euh, ça... ça veut dire quoi ? » Il me fallut un petit instant pour comprendre de quoi elle parlait. J‘avais commencé à m’intéresser aux symboles de fleurs bien après m’être passionnée pour les fleurs, mais j’avais finalement trouvé ça particulièrement intéressant. Je n’avais jamais réalisé avant qu’on pouvait dire tant de choses avec un simple bouquet de fleurs. C’était quelque part assez inutile bien sur, puisque la plupart des gens ignorent tout de la symbolique des fleurs, mais ça avait le mérite de passer le temps et, au même titre qu’un milliard d’autres choses, de m’intéresser. « Je peux sentir ? Enfin, si ça ne vous gêne pas, bien sur. » Je souris et lui tendis le semblant de bouquet. « Je vous en prie. » Tendis qu’elle humait les fleurs, un drôle de sentiment me traversa le cœur. Comme si c’était aussi simple que ça d’être heureux. Souriant à ma propre bêtise, je réalisai que je n’avais pas répondu à sa question. « Ces roses blanches sont en fait des garces. Elles signifient le cœur qui ne sait pas comment aimer. Et ce lys veut dire « ose m’aimer ». On associe souvent ces fleurs parce qu’elles sont jolies en bouquets, et que leurs parfums s’accordent. Pourtant, ose m’aimer même si tu ne sais pas comment, c’est finalement un message assez étrange. » Je souris, espérant de tout cœur que ça ne découragerait pas ma nouvelle client d’acheter des fleurs. Il fallait vraiment que je revois mes méthodes de ventes.
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| | | admin ⚓ So I flew to the sun. Lost track of my soul on the run.
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| Sujet: Re: Tous les matins du monde Dim 21 Aoû - 17:33 | |
| “ earth laughs in flowers ”J'admirais les gens passionnés, ils avaient une chose à laquelle se raccrocher sans cesse quand tout leur tournait le dos. Un recueil, une manière de se retrouver peu importe le chemin qu'ils avaient pris. Je ne m'intéressais globalement à rien. C'était rare de voir des personnes qui arrivaient à suivre leurs voies du début à la fin, j'étudiais en civilisation sans vraiment écouter, juste pour avoir un diplôme. Je ne choisissais jamais ce qui me plaisait, mais ce qui ressemblerait le moins à une torture. Ma vie était une torture, incessante, de la première seconde de ma journée à la dernière. De ne pas avoir dormi allait rendre les heures encore plus éprouvantes que d'ordinaire, le manque de sommeil me tuerait à petit feu, d'une manière lente et douloureuse. Il était encore tôt, mais lorsque viendrait onze heures, avec une légère crise d'hypoglycémie, je n'aurais qu'une envie : me coucher. Et c'était sans doute ce que j'allais faire. Pour le moment, je me laissais berner entre le rire de la vendeuse et les parfums des fleurs. Qu'elle se moque ou non, je m'en fichais pas mal. Si l'on s'arrêtait à ce que les autres pensent de nous, nous ne serions pas grand chose. Mais si l'on s'arrêtait à notre opinion de nous-mêmes, ce ne serait pas non plus fameux. J'avais vraiment l'impression parfois de faire tâche, dans le genre qui ne s'en va pas après plusieurs lavages. Indélébile, encrée. Comme une marque au fer blanc. Au final, on doit juste continuer à avancer, sans se poser de questions comme des animaux. Se remuer le crâne nous donne envie de le faire sauter. Il faut apprendre à mettre un pied devant l'autre, ne pas reculer, ne pas réfléchir. Si on cherche notre place dans ce monde, on découvre que nous n'en avons pas. D'avoir une passion nous donne l'impression d'être dévoué à quelque chose, de valoir la peine. De mettre son cœur dans un acte, et ne pas le laisser partir à la dérive, comme une bombe à retardement. Je lui fis un doux sourire, me posant une question qui n'avait pas réellement de réponse, personne n'avait vraiment de place, pour moi. Mais ses fleurs lui donnaient une raison d'être. Cela devait faire du bien, de se sentir utile, parfois.
Je pris les fleurs entre mes doigts, essayant d'être la plus délicate possible et caressa les pétales de mon index en faisant un léger sourire, avant de porter le bouquet prêt de mon visage, pour profiter pleinement de leurs odeurs. Le lys, plus fort, surplombait la rose qui donnait toutefois une touche de fraicheur dans le bouquet. Je fermais les yeux quelques instants, alors que je respirais encore cette atmosphère, et ouvrit les paupières alors qu'elle finissait de me raconter les symboles de ces plantes, qui, malgré les apparences, cachaient bien leur jeu. Sans pour autant m'y connaître, j'essayais de comprendre, de nature curieuse. « Peut-être que ça veut juste dire qu'il faut savoir prendre des risques. Vivre un premier amour, vous savez, on ne doit pas vraiment savoir comment faire au début mais on se lance quand même. Sauter du plongeoir, et plonger dans l'inconnu. » Je finis par faire un demi-sourire et hausser les épaules, je n'étais pas, évidemment, sure de moi mais je ne voyais pas les fleurs pouvoir dire du mal ou délivrer une mauvaise chose. Sans doute pour garder espoir en la bonté de quelque chose, même si elle n'étais pas humaine. Même si ce n'était que des plantes. Des plantes qui permettaient à beaucoup de couples de se réconcilier, aider à digérer les mensonges, prouver de l'amour, inviter quelqu'un. C'était à la fois unique et façonable. Fascinant. hj ; désolée, ariel parle vraiment pas des masses x) |
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